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non pas même ces ombres que le poète florentin vit si légères au vent et à qui il eut grande envie de parler. Il fit part de son désir à son guide, qui lui répondit :

            Vedrai quando saranno
 Piu presso a noi : e tu allor li prega
 Par quell’amor che i mena, e quei verranno.

« Attends un peu qu’elles soient plus près de nous ; prie-les alors par cet amour qui les emporte, et elles viendront. »

C’est aussi au nom de l’amour qu’il faut prier madame de Sabran. Aimer fut, en ce monde, la grande affaire de sa vie, et si elle fait quelque chose aujourd’hui dans l’autre monde, ce doit être exactement ce qu’elle faisait dans celui-ci.

I

Madame de Sabran sans amour ne serait pas madame de Sabran. Elle n’aima qu’une fois sur cette terre, mais ce fut pour la vie. Cela lui arriva en 1777. Elle avait vingt-sept ans alors et était veuve depuis plusieurs années d’un mari qui, de son vivant, avait eu cinquante ans de plus qu’elle. Veuve avec deux enfants, elle ne se croyait plus aimable parce que la fleur de sa beauté s’en était déjà allée. Mais elle était exquise. Les éditeurs de sa correspondance ont donné son portrait d’après