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trouble. La plupart du temps, les hommes se rendent malheureux par leur faute ; ils souffrent parce qu’ils sont privés de ce qu’ils croient être un bien ou que, le possédant, ils craignent de le perdre, ou parce qu’ils endurent ce qu’ils croient être un mal. Supprimez toute croyance de ce genre, et tous les maux disparaîtront… »

Pour Pyrrhon, comme pour Démocrate, le bien suprême est la bonne humeur, l’absence de crainte, la tranquillité.

« Se replier sur soi-même, dit M. Victor Brochard, afin de donner au malheur le moins de prise possible ; vivre simplement et modestement, comme les humbles, sans prétention d’aucune sorte ; laisser aller le monde et prendre son parti de maux qu’il n’est au pouvoir de personne d’empêcher ; voilà l’idéal du sceptique. » Pyrrhon soutenait qu’il n’importe pas plus de vivre que de mourir ou de mourir que de vivre.

— Pourquoi donc ne mourez-vous pas ? lui demanda-t-on.

— C’est à cause de cela même, répondit-il, c’est parce que la vie et la mort sont également indifférentes.

Dans un grand péril de naufrage, il fut le seul que la tempête n’étonna point. Comme il vit les autres passagers saisis de crainte et de tristesse, il les pria d’un air tranquille de regarder un pourceau qui était là et qui mangeait à son ordinaire.

— Voilà, leur dit-il, quelle doit être l’insensibilité du sage.

À merveille. Le pourceau était sage ; mais il y avait