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les torts de l’histoire.

récemment, ou cru déterminer, d’une manière approximative l’âge de la terre. La terre n’est pas vieille. Elle existe à l’état solide depuis 25 millions d’années au plus et il n’y a guère que 12 millions d’années qu’elle a donné la vie à des herbes marines et à des coquillages. Une lente évolution a produit les plantes et les animaux. L’homme est venu le dernier : il est né d’hier. Il est encore dans le feu de la jeunesse. Il ne faut pas lui demander d’être trop raisonnable. Il a besoin d’être amusé par des contes. Ne lui ôtez pas l’histoire, qui est son plus bel amusement intellectuel. S’il faut des contes à l’humanité, répondra M. Bourdeau, n’avons-nous pas les poètes. Ils sont plus amusants que les historiens et ils ne sont pas beaucoup plus faux. M. Bourdeau, qui est si dur pour les annalistes, les chroniqueurs et généralement pour tous les mémorialistes, garde, au contraire, dans son cœur, des trésors d’indulgence pour les poètes. Comme ils ne tirent point à conséquence, il leur pardonne tout. J’ai remarqué que les philosophes vivaient généralement en bonne intelligence avec les poètes. Les philosophes savent que les poètes ne pensent pas ; cela les désarme, les attendrit et les enchante. Mais ils voient que les historiens pensent, et qu’ils pensent autrement que les philosophes. C’est ce que les philosophes ne pardonnent pas. M. Bourdeau nous renvoie à l’Iliade et à Peau d’Ane. Ce sont là de beaux contes. Mais nous n’y croyons plus guère. Nous voulons des contes que nous puissions croire, l’histoire de la Révolution française, par exemple. Laissez-nous le roman