sur l’épaule ; mais ils ne peuvent tourner la tête pour les voir. Ils sont à jamais exempts de joie et de douleur. Pour l’antique Hellène, la mort est sûre.
C’est un sommeil sans songes comme sans réveil. Certaines épigrammes de l’Anthologie expriment admirablement la paix des tombes antiques. On y dort bien. Et si les ombres parlent, elles ne parlent que des choses de la terre. Elles n’en savent point d’autres. Écoutez ces paroles échangées il y a deux mille ans sur quelque route parfumée de myrtes, bordée de blancs tombeaux, entre un voyageur et l’ombre d’une jeune femme :
« Qui es-tu ; de qui es-tu fille, ô femme couchée sous ce cippe de marbre ? — Je suis Praxo, la fille de Callitèle. — Où es-tu née ? — À Samos. — Qui t’a élevé ce tombeau ? — Théocrite, qui délia ma ceinture. — Comment es-tu morte ? — Dans les douleurs de l’enfantement. — Quel âge avais-tu ? — Vingt-deux ans. — Laisses-tu un enfant ? — Je laisse un fils de trois ans, le petit Callitèle. — Puisse-t-il arriver à l’âge où l’on honorera ses cheveux blancs ? — Et toi, passant, que la fortune te donne tout ce qu’on souhaite en cette vie ! »
Voilà des êtres bienveillants ! Et comme la morte et le vivant sont encore du même monde ! Cette bonne Praxo, du fond de son tombeau, ne connaît qu’une seule vie, celle de la terre. La mort, ainsi comprise, était quelque chose d’extrêmement simple.
Aussi ne faut-il pas s’étonner si les tombeaux antiques ne présentent point aux yeux des images lugubres. Deux jeunes savants du plus grand mérite, MM. Edmond Pottier