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eux. La férocité des fourmis est effroyable ; les femelles des lapins dévorent souvent leurs petits ; les loups, quoi qu’on dise, se mangent entre eux ; on a vu des femelles d’orangs-outangs tuer une rivale. Ce sont là des crimes ; et si les pauvres bêtes qui les commettent n’en sont pas responsables, c’est donc la nature qu’il faut accuser ; elle a attaché vraiment trop de misères à la condition des hommes et des animaux.

Mais aussi, comme il est sublime cet effort victorieux de l’homme pour s’affranchir des vieux liens du crime ! Qu’elle est auguste cette lente édification de la morale ! Les hommes ont peu à peu constitué la justice. La violence, qui était la règle, est aujourd’hui l’exception. Le crime est devenu une sorte d’anomalie, quelque chose d’inconciliable : avec la vie nouvelle, telle que l’homme l’a faite à force de patience et de courage. Entré dans une existence, le crime la ronge et la dévore : il est désormais un vice radical, un germe morbide. C’était le vieux nourricier des hommes des cavernes ; maintenant il empoisonne les misérables qui lui demandent la vie. C’est ce que M. Hector Malot a fait voir après Dostoiëvsky.