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avec sa nourrice. On y faisait ses dents. On s’y mariait à douze ou treize ans. L’usage fréquent de ces mariages était alors une des plaies de la société. Les fiancés, les maris venaient au parloir. La petite princesse Massalska raconte que mademoiselle de Bourbonne revint un jour fort triste du monde ; le surlendemain, elle fit part à ses compagnes de son mariage avec M. d’Avaux. Elle avait à peine douze ans ; elle devait faire sa première communion dans la semaine, se marier huit jours après et rentrer au couvent. « Elle était si excessivement mélancolique, raconte Hélène, que nous lui demandâmes si son futur ne lui plaisait pas ; elle nous dit franchement qu’il était bien laid et bien vieux ; elle nous dit aussi qu’il devait venir la voir le lendemain. Nous priâmes madame l’abbesse de permettre qu’on nous ouvrît l’appartement d’Orléans, qui avait vue sur la cour abbatiale, pour que nous voyions le futur mari de notre compagne ; on nous l’accorda. Le lendemain, à son réveil, mademoiselle de Bourbonne reçut un gros bouquet, et, l’après-midi, M. d’Avaux vint. Nous le trouvâmes comme il était, abominable. Quand mademoiselle de Bourbonne sortit du parloir, tout le monde lui disait : « Ah ! mon Dieu, que ton mari est laid ! Si j’étais de toi, je ne l’épouserais pas. Ah ! la malheureuse ! » Et elle disait : « Ah ! je l’épouserai, car papa le veut ; mais je ne l’aimerai pas, c’est une chose sûre. »

Tout cela est bien loin de nous. Si l’on compare l’Abbaye-aux-Bois, la Présentation, Penthémont, les