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devant les vrais dieux et les vraies déesses, et je fus le seul tout à fait respectueux. Il arriva ce jour-là, comme d’habitude, que l’esprit ne fut pas du côté du respect. Je ne sais pas si M. Jules Lemaître admire beaucoup son temps, mais il l’aime. Paris, tel qu’il est, lui plaît beaucoup. Il y est heureux, malgré « l’ennui commun à toute créature bien née ». Le mot n’est pas de moi ; il est de Marguerite d’Angoulême, la sœur de François Ier.

Mais pourquoi, dites-vous, s’il aime tant Paris, nous conduit-il à Rome, chez Sérénus ? Je vous répondrai qu’il a choisi, pour aller à Rome, le temps où l’on avait à Rome bien des idées et bien des sentiments que l’on a aujourd’hui à Paris. Le mal de Sérénus fut l’impossibilité de croire. Sa sœur était chrétienne ; elle était belle ; elle avait la douceur impérieuse des saintes ; elle le conduisit dans la petite église, où il éprouva des sentiments étranges et contradictoires, quelque chose de ce que sentirait un galant homme introduit dans une assemblée des spirites, si les spirites étaient des martyrs, ou dans un conciliabule de nihilistes, si les nihilistes attendaient la mort sans la donner. Il fut saisi d’une sorte d’admiration et il éprouva en même temps d’invincibles répugnances. Voici comment il rend compte lui-même de ce double sentiment. Il analyse d’abord les raisons qu’il a d’admirer et d’aimer ces braves gens :

« Toutes les vertus, dit-il, que les philosophes avaient déjà connues et prêchées, m’apparaissaient,