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LE CHEVALIER DE FLORIAN.

des habitudes particulières au pays où elle était née, et qu’elle l’avait transmis à son fils ». Il la perdit de bonne heure et fut mis au collège. Il eut beaucoup de maîtres. L’un d’eux le menait souvent chez une demoiselle de la rue des Prêtres, qui demeurait au cinquième étage et peignait des éventails. « Je remarquai, contait-il lui-même plus tard, qu’il avait presque toujours quelque chose à lui dire en particulier, ce qui les obligeait de passer dans la chambre d’à côté. Un jour, j’eus la curiosité d’aller regarder par le trou de la serrure ; je les vis qui causaient, mais d’une manière qui me rendit rêveur pour plus de huit jours. »

Ce n’est pas des leçons de ce maître qu’il profita le moins. Nous savons de son propre aveu qu’avant dix-sept ans il était « assez heureux pour posséder une maîtresse, un coup d’épée et un ami ». L’ami était un bretteur de la pire espèce qui avait des démêlés avec le guet et causa quelques désagréments au jeune chevalier. Par bonheur, Florian avait aussi un oncle, et cet oncle, ayant épousé une nièce de Voltaire, envoya son neveu à Ferney. Voltaire trouva son petit parent gentil, le caressa et l’appela Floriannet. Il fit mieux encore : il le fit entrer à seize ans comme page chez le duc de Penthièvre. Pour sa bienvenue, le chevalier but avec les autres pages du duc tant de café et de liqueurs, « qu’il en gagna une maladie assez sérieuse ». Ces petits garnements faisaient mille folies. Le bon seigneur n’était pas homme à s’en aviser.