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MARIE BASHKIRTSEFF.

seize ans, elle passait de longues heures devant les marbres du musée du Capitole. Il ne faut pas s’étonner si elle fut ravie dans le même temps d’une amazone « en drap noir, faite d’une seule pièce par Laferrière… une robe princesse collante partout ». Ses mains, fines et très blanches, n’étaient pas d’un dessin très pur ; mais un peintre a dit que c’était une beauté que la façon dont elles se posaient sur les choses. Marie Bashkirtseff en avait le culte. Elle se savait jolie ; pourtant elle se décrit assez peu dans son journal intime. J’ai noté seulement, à la date du 17 juillet 1874, ce portrait, fort joliment arrangé : « Mes cheveux, noués à la Psyché, sont plus roux que jamais. Robe de laine de ce blanc particulier, seyant et gracieux ; un fichu de dentelle autour du cou. J’ai l’air d’un de ces portraits du premier empire ; pour compléter le tableau, il me faudrait être sous un arbre et tenir un livre à la main. » Et elle ajoute qu’elle aime la solitude devant une glace.

Elle était plus vaine de sa voix que de sa beauté. Cette voix s’étendait à trois octaves moins deux notes. Un des premiers rêves de Marie Bashkirtseff fut de devenir une grande cantatrice.

Elle a voulu se montrer dans son Journal telle qu’elle était, avec ses défauts et ses qualités, sa mobilité constante et ses perpétuelles contradictions. M. Edmond de Goncourt, du temps qu’il écrivait l’histoire de Chérie, demandait aux jeunes filles et aux femmes des confidences et des aveux. Marie Bashkirtseff a fait