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bien autre chose, dans ces temps qui nous sembleraient moins obscurs si nous les connaissions mieux. Il y a des hommes qui firent sans doute beaucoup de mal, car on ne peut vivre sans nuire, mais qui firent plus de bien encore, puisqu’ils préparèrent le monde meilleur dont nous jouissons aujourd’hui. Ils ont beaucoup souffert, ils ont beaucoup aimé. Ils ont procédé, dans des conditions que les invasions et le mélange des races rendaient très difficiles, à une organisation nouvelle de la société humaine, qui représente une somme de travail et d’efforts dont on reste étonné. Ils portèrent au plus haut degré de l’héroïsme les vertus militaires, qui sont les vertus fondamentales sur lesquels tout l’ordre humain repose encore aujourd’hui. Ils apportèrent au monde ce qui l’honore peut-être le plus : l’esprit chevaleresque. Je sais bien qu’ils étaient violents ; mais j’admire les hommes violents qui travaillent d’un cœur simple à fonder la justice sur la terre et servent à grands coups les grandes causes.

Il y eut, à côté des chevaliers, des juristes pleins de science et d’équité. L’œuvre législative du xiiie siècle est admirable. Nous avons de fortes raisons de croire qu’au début de la guerre de Cent ans la condition des paysans était généralement bonne en France. La féodalité donna d’excellents résultats avant d’en produire de mauvais ; à cet égard, son histoire est celle de toutes les grandes institutions humaines. Je me garderai bien d’esquisser en quelques traits un ta-