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ancien ministre des affaires étrangères, dont les mines de plomb se trouvaient aussi menacées, intervint dans le même sens. L’ambassadeur de France, M. Revoil, l’homme d’Algésiras, menaçait, si l’Espagne n’agissait pas, de débarquer des troupes françaises, ce qui annulerait du coup le traité plaçant le Riff sous la domination espagnole.

Il fallait agir. Le général Marina reçut l’ordre de châtier les tribus rebelles. Au petit bonheur, il razzia quelques villages ; les Maures répondirent en courant aux armes. Bientôt toute la région fut en bataille. Une colonne promenant fièrement le drapeau à travers le pays essuya des coups de fusil.

Dès lors le « drapeau était engagé », « l’honneur national » était en jeu. Et tous les Espagnols étaient tenus de se faire hacher au besoin jusqu’au dernier pour conserver leurs mines à M. Etienne et au marquis de Romanones. Le général Marina demanda 25.000, puis 40.000 hommes. C’était la guerre.

Il est curieux de remarquer avec quelle facilité les gouvernements engagent « l’honneur national ».

Un syndicat de financiers fonde une entreprise en pays étranger ; il ne demande pas pour cela l’autorisation de son gouvernement. Il y va de son plein gré et avec le seul but d’y gagner de l’argent. Il se peut que son entreprise n’ait aucune utilité pour ses nationaux.

Dans le cas qui nous occupe, les mines du Riff présentaient-elles pour l’Espagne un intérêt vital ? Nullement. L’Espagne possède les plus riches gisements de fer du monde, après la Suède ; elle ne les exploite même pas. Faute de capitaux, et aussi d’activité, elle les a laissé tomber aux mains des étrangers, Anglais, Allemands et Français qui possèdent la plupart des mines de la région de Bilbao et Santander. Elle n’a même pas de grandes usines métallurgiques et ses mi-