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LA RÉPUBLIQUE ET SES ENNEMIS.




Hors des principes, pas de solution.




Les amis de la France à l’extérieur sont profondément attristés. Ils trouvent que le grand peuple qui a toutes leurs sympathies se préoccupe toujours trop de certaines individualités et pas assez des institutions appelées à le régir. De là des appréhensions sur l’influence des scènes scandaleuses qui se passent au sein de son Parlement.

Si cependant on voulait faire appel aux principes, certaines difficultés qui semblent insurmontables aujourd’hui s’aplaniraient d’elles-mêmes dès demain.

Prenons comme point de discussion les déportements de M. Paul de Cassagnac.

Qu’arriverait-il si ce personnage arborait dans la rue le drapeau du bonapartisme ? La force publique aurait à marcher contre lui ; le maréchal de Mac-Mahon lui-même n’aurait pu se dispenser d’en donner l’ordre.

Eh bien ! ce que M. de Cassagnac ne pourrait faire sans danger pour lui sur la voie publique, comment arrive-t-il à l’accomplir presque impunément au sein du Parlement ? Tout simplement parce qu’on néglige de remonter aux principes. On croit qu’il a le droit de s’y montrer bonapartiste, tandis qu’il ne devrait y être admis que s’il est républicain.

Les électeurs qui s’imaginent pouvoir envoyer des monarchistes ou des impérialistes à la Chambre ou au Sénat au nom de la souveraineté du peuple sont des ignorants ou des traîtres, des aveugles ou des dupes ; et, leurs élus, quels qu’ils soient, appartiennent également à l’une ou à l’autre de ces catégories.

Au point de vue du droit absolu, la République est la seule forme légitime de gouvernement. Mais cette affirmation seule serait vaine si elle n’était appuyée une restriction conservatrice. Cette restriction est celle-ci : La République admet tous les hommes à la jouissance des droits politiques ; elle ne fait exception qu’à l’égard de ceux qui déclarent ne vouloir user de ces droits que pour les anéantir.

Comment ! les républicains ont la bonhomie de se croire liés par les prétentions de leurs ennemis, qui leur disent narquoisement : « Quand vous êtes au pouvoir, nous réclamons la liberté au nom de vos principes ; mais lorsque nous sommes, nous vous la refusons au nom des nôtres ! ».

Comment ! il y a des motifs, même des prétextes, qui vous empêchent d’être lecteur, qui s’opposent à votre élection à n’importe quelle fonction. Un cas d’ivrognerie, un délit de presse, un désastre commercial, et vous voilà privé de vos droits politiques. Et ceux qui font profession d’asservir leurs concitoyens, de leur enlever leurs libertés les plus chères, de les déporter, de les exiler, de les tuer même, auraient le droit de se présenter au scrutin, auraient le droit d’entrer dans une assemblée républicaine ? Ah ! mais non. C’est plus que de la duperie, c’est un crime de le souffrir.