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SAPHO, DOMPTEUSE

mencer les préparatifs d’un long voyage qu’il comptait entreprendre à travers le monde.

Seul, un déplacement de quelque durée pourrait, songeait-il, le sauver des autres et de lui-même, lui créer des émotions nouvelles, effacer la honte des jours de détention dans la prison infâme.

En se glissant entre ses draps, la veille du jour fixé pour son départ, il lui sembla, dans l’incohérence de ses sentiments, la fragilité de ses idées, qu’il se trouvait dans la situation d’un naufragé qui serait ballotté par des vagues furieuses et reporté, tantôt vers la terre hospitalière, tantôt vers la mer en fureur, sans pouvoir se rendre compte si, enfin, une lame plus forte que les autres le déposera sur la grève ou si un remous formidable l’entraînera vers l’abîme.

Sa nuit fut faite de fugitives somnolences que rompaient des rêves tourmentés, et, lorsqu’il quitta sa couche, il ressentit une lassitude extrême comme si tous ses membres s’étaient meurtris dans une chute. Ce qu’il avait subi, depuis deux mois, était en effet extraordinaire,