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SAPHO, DOMPTEUSE

ses projets, le secret de l’étrange fascination qu’elle produisait sur des êtres jusqu’alors incapables de sincère attachement.

Les journaux rapportaient ses paroles ; aucun encens n’était assez pur, aucun hommage ne semblait assez flatteur pour exalter sa gloire.

Sapho eût été heureuse, sans l’internement de Christian qu’elle ne pouvait s’empêcher de plaindre et d’aimer. À distance, tous les torts de l’amant s’effaçaient ; elle vibrait de tendresse, comme aux premiers jours, n’était plus qu’une âme en peine à la recherche de son complément.

Parfois, un tigre s’échappait, et la foule en déroute poussait des cris d’épouvante, se réfugiait aux hasards des abris. La dompteuse, alors, courait à la suite du fuyard, le rappelait par de douces paroles, l’appât d’un morceau succulent qu’elle lui tendait de loin. L’animal semblait se jouer d’elle, gambadait par les rues, s’aiguisait les griffes sur les arbres de la place, et, finalement, se blottissait dans un couloir, monstre formidable et sournois, déjà tremblant sous les regards enflammés de la femme.