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SAPHO, DOMPTEUSE

Qui que tu sois, passant, dans l’ombre de Suburre,
Arrête-toi, je suis celle que tu cherchais !…
Arrête-toi, passant, l’amoureuse aventure
Aura pour toi l’attrait des grands bonheurs cachés !

Arrête-toi, passant, voici que la nuit plane
Sur la cité perverse où s’égarent tes pas ;
Je sais des voluptés qu’ignore le profane ;
Ô passant ! tu frémis, mais tu ne réponds pas ?…

Je suis celle qui fit l’étonnement de Rome,
Le reine des plaisirs, la reine de l’amour !
Je te le dis, tout bas, Messaline on me nomme :
Courtisane la nuit, souveraine le jour !

Puis l’ombre se faisait sur la scène pour sa transformation en Salomé. Elle apparaissait dans un tissu arachnéen, serré autour de ses flancs et de ses genoux. Son corps se tordait lascivement, s’offrait, semblait s’abandonner. Elle exprimait le dédain, la cruauté vicieuse, la joie du triomphe. Les anneaux de ses chevilles s’entrechoquaient, les cabochons de sa ceinture avaient des lueurs glauques et elle chantait devant un Hérode imaginaire :

Avant d’accepter ta caresse,
Ô roi tout-puissant !
Je veux, pour prix de ma jeunesse.
Une fleur de sang !