Page:La Vaudère - Sapho, dompteuse, 1908.djvu/217

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
212
SAPHO, DOMPTEUSE

qui s’ouvrait en touchant terre, montrant une blessure d’or dans sa chair violette. Te rappelles-tu le goût délicieux de ces prunes qui sentaient le miel et la vanille ?… La vie, le passé, l’avenir, c’était notre tendresse, nos baisers, nos extases. Tout s’abolissait devant cette ardente félicité.

— Nous avons été trop heureux, peut-être !

— Comme il nous semblait grand, ce jardin tout plein de notre amour !… Les feuillages roulaient jusqu’à l’horizon, avec un bruit de vagues sous les brises ; les chemins d’herbe fine serpentaient entre les arbres serrés dont les bras s’unissant formaient très haut un dôme d’émeraude.

— Certes, il était bien beau le parc de nos rêves !…

— Quand les étoiles s’allumaient nous marchions encore, les pieds légers, sur le tapis de soie des mousses odorantes. Et ce n’était pas la nuit qui venait, c’était une douceur discrète, une tendresse voilée, un coin de mystère qui nous charmait.

— Je te croyais las de toutes ces choses j’ai craint de te déplaire.