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SAPHO, DOMPTEUSE

l’heure des départs sensuels, prenaient leur billet, en quelque gare tumultueusement banale, et s’affalaient sur les coussins des wagons hospitaliers, faisant et refaisant sans cesse le même voyage circulaire, à prix réduits.

Ludovic, il est vrai, avait gardé Faustine, mais c’était uniquement par habitude ou voluptueuse paresse. Faustine l’amusait et lui coûtait peu — deux qualités précieuses, en ce temps où la générosité a rejoint les vieilles lunes du sentiment.

Arlette, Malaga et la petite écuyère du cirque Salvator s’amusaient follement, lâchées comme des pouliches dans l’herbe haute semée de scabieuses automnales.

Ludovic imitait la voix des paillasses, inventait des boniments extraordinaires, tandis que Sapho et Faustine, un peu à l’écart, causaient à voix basse.

Et toutes, plus ou moins, avaient connu la misère, les durs commencements ; toutes avaient marché, courbées sous le vent qui mord la chair, qui brûle les yeux, auprès des roulottes sordides. Tandis que les viveurs, les soupeurs du