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LES ANDROGYNES

soi. Le fauve frémissait dans l’ombre, l’exquis poète devenait un homme, et, moins, peut-être, un civilisé.

— André, dit-elle, tu ne m’aimes plus comme hier, et, demain, tu ne m’aimeras plus comme aujourd’hui.

— Tu te plains après ce que…

— Oh ! tu m’as fait mal… rien de plus.

En effet, il avait été brutal, sans amour réel, volontaire, compliqué, dédaigneux des habituelles ivresses. Elle retrouvait en lui la vanité méchante des premiers amants et leur besoin d’humilier la femme qui s’est donnée par des regards, des gestes, des expressions de physionomie, plus encore que par des paroles. De son côté — étrange revirement de l’esprit humain — André qui, tout à l’heure, avait follement convoité Fiamette, se disait que l’amour ardent, complet, durable est chose impossible, que les plus beaux jouets se cassent et se ternissent, que les plus brûlants désirs s’éteignent, aussitôt réalisés, qu’il n’y a rien dans rien !… Le levain de haine, qui fermente au cœur de tous les amants, se montrait confusément en lui. Il en voulait presque à sa