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LES ANDROGYNES

reuse, attendant la nuit pour capturer les insectes imprudents. Elle dormait, cruelle et lascive, rêvant de meurtres et de baisers. Elle dormait, pareille à l’orchidée morbide, à la fleur succube, la courtisane éternelle dont meurent les êtres et les plantes.

Chozelle, dans ce luxueux ballet, aurait pu mettre un peu de symbolisme et de psychologie, avec la glorification de la femme cruelle et perverse, créée par Dieu pour le châtiment des crimes d’amour. Une poésie délicate, une pensée artiste auraient pu soutenir ce sujet trop souvent défloré. Mais Chozelle n’avait pas de visées si hautes. Attiré toujours par la laideur bizarre, il avait mis une chauve-souris à la scène, et un chat-huant apparaissait pour vaincre l’enchanteresse. À son tour la pauvrette s’amendait, suppliait, vaincue par le charme de l’oiseau de proie. Il y avait, au clair de la lune, des chevauchées de lamies et d’empuses, des combats de gnomes hideux, puis, une bonne fée apparaissait, et, comme dans tous les contes pour les petits enfants, rendait aux amoureux leur forme primitive.

Le prince épousait la princesse.