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LE RÊVE DE MYSÈS

L’heure passait ; et, peu à peu, sortant de son plaisir charnel, il sentait une présence occulte flotter dans l’air ; une forme s’efforçait de transparaître, de se traîner dans l’espace devenu indéfinissable, et les regards dilatés, le cœur battant, il demeurait immobile, anxieusement.

— À quoi penses-tu ? demandait Mahdoura.

Et lui, n’osant avouer son trouble soudain, inventait un prétexte.

— Nous sommes coupables, disait-il, de nous aimer dans l’enceinte des morts… Ne pourraient-ils se venger de notre audace ?…

— Bah !… Ils ont été des amants, comme nous. Pourquoi se fâcheraient-ils d’une joie qu’ils partagent peut-être dans leur sombre hypogée ?… Ne penses-tu point que les défunts sont plus généreux et compatissants que les hommes que nous frôlons sur terre ?…

Et, de fait, les colosses de pierre, les sphinx accroupis semblaient les protéger contre les attaques des vivants.

C’étaient, certes, des êtres de bonté et de pardon, pleins de force, de gloire et de silence.

Les jeunes gens attendaient, de leur souveraine justice, l’appui dont ils avaient besoin pour continuer à se chérir librement devant les humains.