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mutpāda. L’explication de l’existence par la « production en dépendance » s’oppose, nous dit-on, non seulement à la théorie de l’existence fortuite (adhicca), mais encore à celle de l’origine d’une chose par soi, par autrui, par soi et autrui combinés {Samyutta, ii, 113, comparer i, 134, Udâna, 69 ; Siîcsàsamuccat/a, p. 225). Ceci est, en propres termes, la dialectique du Madhyamaka, le « dilemme » à quatre branches {prasanga) par lequel Buddhapâlita, élève de Nâgârjuna, démontrera la non-production (anutpàda) de quoi que ce soit. — Il parait évident que les causes ou pratyayas sont " autrui n à l’égard de « ce qui est produit en conséquence de ... » (pratityasamutpatma), et la Madhyamakavrttt p. 76 nous assm-e que les partisans du Pratïtyasamutpâda en conviennent.

Nous verrons donc dans le passage indiqué du Samyutta (ii, 113), de deux choses l’une, ou bien un enthousiasme aveugle pour ce dogme merveilleux de la Production, dogme qu’on déclare parfois incompréhensible {acintya) (1), mais toujours « profond » et « nouveau » ; ou bien la pensée, plus tard très consciente, que « ce qui est produit en conséquence de ... » n’est pas produit eu réalité et n’existe pas en soi : « tout est douloureux, transitoire, vide, sans substance ». Pourquoi les premiers docteurs n’auraient-ils pas compris tout ce que cette formule porte de nihilisme ?

5. La causalité dans le système des Vijñānavādins (2).

Les Vijñānavādins nient l’existence de la matière (rūpa) ou, d’une manière générale, de l’objet de la connaissance (jñeya). Rien n’existe que la pensée (citta), et, strictement, on ne peut dire que la pensée se connaisse elle-même, car la pensée serait alors son objet ; il y aurait dualité ; il y aurait autre chose que « pensée pure » (cittamātra). Ceci posé, comment faut-il entendre le Pratītyasamutpāda interne et externe ?

(1) L’Aṅguttara, ii, 80 {Sumangalatildsinl, p. 22) dit que la rétribution du harman est incompréhensible ; comparer Madhyamakdvatàra, vi, 42, et Milinda, p. 189, — Les Mâdhyamikas insistent sur ’incompréhensibilité du Pratïtyasamutpâda, Bodhicary avatar a, ix, 4, 100.

(2) Voir Bodhisattvabhûmi, i, chap. viii, Sommaire dans Muséon, 1911, p. 176.