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On eut raison de cette mère qui avait vu adjuger son propre bien à sa fille, en la déportant sur une île voisine.

Un mois après cet audacieux jugement, le juge impérial Longomazino achetait dans son cabinet, au tribunal, ce même terrain de la femme Vahineheau dans les circonstances suivantes… Cette femme, que toute sa famille prétendait mineure, avait été pourvue par M. Bonnet, chargé de ce service au bureau indigène, d’un acte de notoriété sans témoins, la déclarant majeure.

L’acte de vente fut rédigé dans le cabinet du juge impérial, par l’interprète judiciaire de ce dernier, M. Orsmond, en présence de l’ami de Longomazino, M. Bonnet. Que venait faire ici le directeur des affaires indigènes qui, comme chacun le sait à Taïti, est une autorité terriblement respectée par le natif ?

La femme Vahineheau ne sachant signer, l’interprète du juge, le sieur Orsmond, lui tient la main, lui fait tracer son nom, M. Bonnet signe à l’acte, et la vente est accomplie, et un terrain valant haut la main huit à dix mille francs dans le pays est acheté pour deux mille.

Cet acte de vente, tramé dans l’ombre contrairement à la loi, n’est pas rédigé en double… et la femme Vahineheau quitte le palais de justice sans emporter une copie de son acte.

À peine cette vente est-elle connue, que la famille entière proteste à nouveau. Vahineheau elle-même soutient qu’elle a été trompée, menacée même…

Le scandale s’accentue au dehors… il faut la police pour chasser les pauvres gens de leur terrain, Longomazino emploie la police… fait rendre par son tribunal deux jugements d’envoi en possession, jugements rendus par défaut contre