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Au soir tombant, leurs voix fraîches éveilleront
L’écho des jours lointains dormant dans ma mémoire ;
Je verrai s’allumer les astres sur mon front
Comme des lampes d’or au fond d’un oratoire ;

Et lorsque peu à peu les funèbres pavots
Sur mes yeux lourds seront tombés comme des voiles,
Mon dernier souffle, avec l’odeur des foins nouveaux,
S’en ira lentement vers le ciel plein d’étoiles.

André Theuriet.


LA CHIMÈRE


Protée est mon parfait emblème :
Nul jamais ne peut me saisir…
Je porte un riant diadème
Formé des roses du plaisir !

Mon sourire inspire l’ivresse ;
Mon regard fait germer des fleurs…
Je suis la grande enchanteresse
Qui promet l’oubli des douleurs !…

Mais, aux caresses de mes songes,
L’homme follement délecté
Veut en vain par mes doux mensonges
Colorer la réalité…

Je suis fugitive et légère,
Et ma décevante splendeur
N’est qu’une image passagère…
Qu’importe ?… Je suis le bonheur !

Gabriel Monavon.