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dites-moi ce qui existe aujourd’hui. En est-il resté quelque chose de ces quartiers ? »


« Pas un pouce, » dit-il, « mais quelques souvenirs en sont restés et j’en suis heureux. Une fois par an, un jour de mai, nous donnons une fête solennelle dans les communes de l’est de Londres, pour commémorer le « déblaiement » de la misère, comme c’est appelé. Ce jour-là, nous faisons de la musique, nous dansons, nous nous l1vrons à des jeux et donnons de joyeux festivals sur l’emplacement où se trouvaient les pires anciens repaires, dont nous avons gardé le souvenir traditionnel. A cette occasion on a l’habitude de faire chanter aux plus jolies filles quelques-uns des anciens chants révolutionnaires, ces chants qui exprimaient les gémissements des mécontents qui vivaient autrefois si désespérés, en ces lieux où ces terribles crimes d’assassinats de classes furent commis, tous les jours, pendant de si longues années.


Pour un homme comme moi, qui a beaucoup étudié le passé, c’est un spectacle curieux et touchant que de voir ces quelques jolies filles, gracieusement drapées et couronnées de fleurs des champs, au milieu de gens heureux, sur l’emplacement même où dans les anciens temps il y avait de misérables masures, des tanières dans lesquelles les hommes et les femmes vivaient encaqués dans l’ordure comme des anchois dans un tonnelet, où ils vivaient d’une telle manière qu’ils ne pouvaient l’endurer que parce que, comme je l’ai dit, ils étaient dégradés plus bas que l’humanité. C’est un spectacle touchant d’entendre les terribles paroles de menace et de lamentation sortant de ces douces et belles lèvres, et elles sont inconscientes de leur véritable signification : de les entendre chanter, par exemple, le Chant de la Chemise, de Hood, et de penser tout le temps qu’elles ne comprennent pas ce que cela veut dire, — une tragédie devenue inconcevable pour elles et leurs auditeurs. Pensez à cela si vous pouvez et jugez combien la vie est devenue admirable ! »


« Vraiment », dis-je, « il est pénible pour moi d’y penser. »


Et j’observais combien ses yeux brillaient et comme la vie nouvelle semblait illuminer son visage, et je m’étonnais comment à son âge il pensait au bonheur du monde ou à n’importe quelle autre chose, si ce n’est à son prochain dîner.


« Raccontez-moi en détail, » dis-je, « comment est le pays à l’est de Bloomsbury maintenant ? »


— Il n’y a que très peu de maisons d’ici à l’extrémité de l’ancienne ville ; mais dans la cité nous avons une population compacte. Nos ancêtres, lors du premier déblaiement des repaires, n’étaient pas pressés de démolir les maisons qui étaient situées dans le quartier de la ville destiné aux