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sur mon aveu, et j’abandonnai le sujet de l’éducation, m’apercevant qu’il était inutile de lui faire comprendre ces choses-là.


Je pensai un peu et continuai : « Vous parliez tantôt du ménage et ce que vous disiez me semblait être assez en rapport avec les coutumes du temps passé ; je croyais que vous viviez plus en public ».


« Des phalanstères, eh ? » répondit-il. « Bien, nous vivons comme il nous plaît et nous aimons à vivre ordinairement avec des compagnons à la société desquels nous sommes habitués. Rappelez-vous donc que la pauvreté a disparu et que les phalanstères fouriéristes et tous ceux de leur espèce, qui étaient nécessaires dans leur temps, n’étaient en somme que des refuges ayant pour cause le délaissement dans lequel on était. Un tel genre de vie pouvait seulement convenir à des gens entourés des pires formes de la pauvreté. Mais vous devez comprendre que quoique les ménages séparés soient la règle parmi nous et qu’ils diffèrent plus ou moins dans leurs habitudes, cependant pas une porte n’est fermée à une personne de bon caractère, qui est contente de vivre comme les compagnons du ménage : il serait évidemment déraisonnable de la part de n’importe qui de pénétrer dans un ménage et d’exiger que des gens changent leurs habitudes pour lui, quand il peut aller ailleurs et y vivre comme cela lui plaît. Cependant, je n’ai pas besoin de vous donner beaucoup d’explications sur tout cela, puisque vous allez remonter la rivière avec Dick et que vous verrez par vous-même comment toutes ces choses sont arrangées. »


Après une pose, je repris : « Vos grandes villes, maintenant, comment sont-elles ? Londres que j’ai lu être la Babylone moderne de la civilisation, paraît avoir disparu ».


« Bien, bien », répondit le vieux Hammond, « peut-être après tout estelle maintenant plus semblable à l’ancienne Babylone que ne l’était la moderne Babylone du XIXe siècle. Mais passons. Après tout, il y a une assez nombreuse population qui habite d’ici à Hammersmith ; vous n’avez pas encore vu du reste la partie la plus populeuse de la ville. »


— Dites-moi donc, comment cela est-il vers l’est ?


— Il y eu un temps où, monté sur un bon cheval, vous pouviez partir d’ici, de ma porte, faire un tour d’une heure et demie et toujours rester dans le centre de Londres, et la plus grande partie traversée par vous aurait été le quartier « des repaires », comme ils étaient appelés ; c’est-à-dire des lieux de torture pour des femmes et des hommes innocents, ou, ce qui est pire, des « étuves » pour élever et engendrer des hommes et des femmes dans un tel état de dégradation, que cette torture leur paraissait être la vie simple et ordinaire.


« Je sais, je sais », dis-je, un peu impatienté, « c’était ainsi ; mais