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LE MOIS

COURRIER PARISIEN

Mai est le mois des expositions, des Salons de toutes sortes et l’on sait que depuis deux ou trois ans, à chaque retour de cette saison bénie, d’imposantes cohortes d’artistes s’emparent de palais divers et de grandissimes hangars, afin d’en tapisser les murs de kilomètres et de kilomètres de toiles enduites de couleurs variées. C’est là une noble chose et un étonnant spectacle. Le succès, avouons-le, récompense généralement ces tentatives.

Cette semaine, la foule a envahi le Salon des Champs-Élysées, celui du Champ de Mars, l’Expositíon des Arts libéraux, du Blanc et Noir, quoi encore ! À côté des deux principales expositions des Champs-Élysées et du Champ de Mars, dont nous reparlerons, il en est de moindre envergure et de plus modestes prétentions dont les tentatives ne sont pas sans mérite. L’une d’elles, que nous sommes allés voir, a pris pour titre : « Union libérale d’artistes français » Sa fondation est de date récente et cette année elle s’est installée au Palais des Arts libéraux, à côté de sa puissante rivale, la « Société Nationale des Beaux-Arts », que préside Puvis de Chavannes.

L' « Union libérale » a su grouper des œuvres intéressantes, en petit nombre il est vrai, mais qui suffisent à lui assurer un succès un peu inattendu.

Parmi les artistes qui ont exposé là, citons des œuvres qui nous ont paru d’un réel intérêt, savoir :

De Léon Cugnot, Femme au bain, plâtre d’une plastique voluptueuse et fidèle ; de de Combles : des paysages véhéments, parmi lesquels la Maison de Diaz à Barbizon, et Saisons fleuries.

Citons encore de A. Lalyre, des Sirènes, se tordant passionnément au cœur des vagues et des études de femmes nues rappelant un peu trop les nymphes d’Henner ; le tout d’un beau dessin et d’une composition savante.

N’oublions pas M. Kaplan, qui nous présente une série d’études dans la manière impressionniste ; M. Mangin, plus apte à rendre le paysage que des allégories comme son Autrefois ; M. Gillardot, qui nous offre une étude de cimetière la nuit ; M. Daubry-Vaillant, des études de femmes et d’intérieurs au Japon ; de M. Paul de Schipow, une reconnaissance de cavalerie russe s’engage dans un fleuve (c’est là du Neuville et du plus rnauvais) ; de M. de Sauzereau, un merveilleux pastel, portrait de femme nue, dont la grâce amoureuse, la lumineuse splendeur charnelle, la sensuelle harmonie des formes provoquent, à les contempler, une joie savoureuse. Cette œuvre rayonne comme un pur joyau et pour se soustraire à l’impression ressentie, il ne faut rien moins que les cartons et le Christ aux outrages du peintre belge Henry De Groux.