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sement fait, et vous semblez si raisonnables dans ce pays, et votre architecture est si belle, que je suis un peu étonné que vous faites de telles futilités ».

Il semblait, quand je parlais, que c’était un peu ingrat de ma part de dire des choses semblables, après avoir reçu un si joli présent ; mais Dick ne paraissait pas s’apercevoir de mes manières indélicates et répondit :

« Eh bien, je ne sais pas ; c’est un joli objet et puisque personne ne doit les faire, à moins qu’ils ne l’aiment, je ne vois pas pourquoi ils ne le feraient pas quand ils le veulent.

Naturellement, si les sculpteurs étaient rares, ils seraient tous occupés à l’architecture, comme vous l’appelez, et alors ces jouets (un bon terme) ne seraient pas faits ; mais puisqu’il y a tant de gens qui savent sculpter, en effet, presque tout le monde le sait, et comme le travail est un peu rare, ou plutôt nous craignons qu’il ne devienne rare, les gens ne découragent pas les autres de ces ouvrages frivoles. »

Il rêvait un peu et semblait légèrement troublé ; mais bientôt sa figure s’éclaircissait et il reprit :

« Après tout, vous devez admettre que cette pipe est une très jolie chose, avec ce petit monde sous les arbres, le tout si bien coupé, si propre et si fin — trop travaillé peut-être pour une pipe, — mais, malgré tout, c’est très joli. »

— Trop précieux, peut-être, pour son usage.

— Qu’est-ce que c’est ? Je ne vous comprends pas.

J’allais justement essayer de me faire comprendre, quand nous arrivâmes près des portes d’un grand et extravagant édifice, dans lequel un travail paraissait être en train. « Quelle bâtisse est-ce donc ? » demandai-je curieusement, car c’était un plaisir pour moi de voir parmi toutes ces choses étranges, quelque chose qui ressemblait un peu à ce que j’étais habitué de voir, « cela paraît être une manufacture ».

— « Oui, je crois que je sais ce que vous voulez dire, et c’est bien cela, mais nous ne les appelons plus fabriques, mais ateliers communs : c’està-dire des bâtiments où s’assemblent les gens qui désirent travailler en commun ».

— « Je suppose qu’un pouvoir quelconque est employé là. »

« Non, non, dit-il, pourquoi les gens se mettraient-ils en commun pour user du pouvoir, quand ils peuvent l’avoir là où ils vivent ou auprès ? Pourquoi le feraient deux ou trois d’entre eux ou n’importe qui aurait-il un tel dessein ? Non, les gens se réunissent dans ces ateliers communs pour faire un travail manuel, pour lequel travailler ensemble est nécessaire et commode ; cette besogne est souvent très agréable. Là, par exemple, on fait des poteries et du verre ; voyez le sommet des fourneaux. Eh