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LE PRINCIPE DE L’ÉTAT

Manuscrit inédit de Michel Bakounine


On sait que Bakounine, toujours prêt de mettre toute son activité à la disposition de la cause immédiate et urgente, fut par là et par d’autres raisons empêché de publier et même d’élaborer au complet l’ensemble de ses idées politiques et sociales. (Voir la préface au volume d’Œuvres publié à Paris en 1895.) Donc, il faut reconstituer cet ensemble des écrits et fragments de théorie qu’il a laissés : L’Antithéologisme, Dieu et l’État, etc. Ici se range aussi le manuscrit que nous publions : Le Principe de l’État (manuscrit de 36 pages — dont la suite manque — in-4o, écrit d’une écriture très rapide, probablement en 1871). Il était peut-être destiné à être un résumé des idées sur l’État, mais ce sujet ne put être abordé proprement sans enquête sur l’origine des idées religieuses et au milieu d’une dissection du christianisme, ce qui paraît être conservé du manuscrit (36 pages) se termine ; l’auteur allait traiter plus tard des « fictions politiques et juridiques, les unes comme les autres n’étant d’ailleurs que des conséquences ou des transformations de la fiction religieuse » (p. 27 du manuscrit), ce qui explique la disposition et l’arrangement du sujet.

Dans ce fragment se retrouvent de nombreux arguments, conclusions, etc., avec lesquels on est familier d’après les autres écrits de Bakounine : cela s’explique par le fait que, la plupart de ces autres écrits n’ayant pas été publiés de son vivant, il était évidemment libre de les employer dans de nouveaux écrits. Toutefois Bakounine est encore si peu connu et sait trop parler pour lui-même qu’il fallait une excuse pour publier quelque partie inédite de son œuvre. N.

Octobre 1896.


Au fond, la conquête n’est pas seulement l’origine, elle est aussi le but suprême de tous les États, grands ou petits, puissants ou faibles, despotiques ou libéraux, monarchiques, aristocratiques, démocratiques, et voire même socialistes, en supposant que l’idéal des socialistes allemands, celui d’un grand État communiste, se réalise jamais.

Qu’elle a été le point de départ de tous les États, anciens et modernes, cela ne pourra être mis en doute par personne, puisque chaque page de l’histoire universelle le prouve suffisamment. Nul ne contestera non plus que les grands États actuels n’aient pour objet, plus ou moins avoué, la conquête. Mais les États moyens et surtout les petits États, dira-t-on, ne