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terie en avant de leur jupe, souvenir du temps auquel leurs ancêtres n’avaient pour vêture qu’une dépouille de bête. Des joueurs de cornemuse les accompagnent, des nuées de gamins les précèdent, et la joie populaire les suit.

À l’extrémité basse de High Street, au nord du château, s’élève l’abbaye déjà nommée de Holyrood ou « Sainte-Verge ». Elle fut transformée en un palais, bien connu par le séjour qu’y fit Charles X, quand la Révolution de 1830 l’eut chassé du trône de France. Holyrood est hanté par le souvenir de la belle et malheureuse Marie-Stuart — la tant aimée, mais aussi la tant haïe Marie Stuart, en l’honneur de laquelle littérateurs, historiens et théologiens n’ont pas fini de rompre des lances.

Ajoutons que dans la Ville neuve, entre Édimbourg et Leith, la petite colline, dite de Carlton, s’est encombrée de bizarres colonnades, copiées de temples grecs et imitations du Parthénon. Pour ces constructions renouvelées de l’antique ne manquaient ni la pierre ni le marbre ; les carrières avoisinantes les fournissaient en abondance. Édimbourg avait pris au sérieux le surnom de Nouvelle-Athènes que lui avaient valu ses bibliothèques et ses écoles célèbres ; cette appellation, elle la voulait mériter par des monuments d’ordre ionique ou dorique. Néanmoins, la dernière mode est au gothique, sans qu’on puisse dire qu’il ait bien réussi aux édiles. L’architecture étant le produit de son milieu, un style n’est pur et n’est beau qu’à l’époque et dans les pays où il a pris naissance, où il a été senti et vécu.

La vallée où se trouve Holyrood sépare l’agglomération urbaine du volcan depuis longtemps éteint qu’on nomme Arthur’s Seat. Cet Arthur — ou Artus — fut le roi légendaire qui inspira les grandes épopées des Chevaliers de la Table Ronde, tels que Tristan le Léonnais, Perceval et Perce-forest, Galaor et Gauvin, Amadis et Palamède. Une large terrasse circulaire, bordée de basaltes en colonnes, entoure le piton suprême d’où se déroule jusqu’à la mer, jusqu’aux comtés d’outre-Forth, une immense étendue verdoyante.

La campagne commence brusquement au ras de la grand’ville, laquelle n’envoie pas, comme fait Londres, des tentacules dans la province environnante, où elles accrochent bourgs, villes et villages, annexés les uns après les autres. Tout à côté de la cité bruyante s’ouvrent landes et bruyères ; la multitudineuse rumeur des foules et des tambours, les sifflets des fabriques et locomotives font çà et là vibrer les parois des rochers solitaires.

High Street, l’artère principale de la vieille ville, et quasiment l’ancienne ville tout entière, High Street où jadis les prélats se rencontraient avec les grands courtisans, High Street n’était plus, en ces derniers temps, qu’une rue immonde. Lorsque Jacques VI hérita de la couronne d’Angleterre et se transporta à Londres, où il fut suivi par les seigneurs de son entourage,