Page:La Société nouvelle, année 11, tome 1, volume 21, 1895.djvu/209

Cette page a été validée par deux contributeurs.

même que les juifs sont le peuple le plus fatal de l’histoire universelle : dans leur influence ultérieure, ils ont tellement faussé l’humanité, qu’aujourd’hui encore le chrétien peut sentir d’une façon antijuive, sans se considérer comme la conséquence extrême du judaïsme.

Dans ma Généalogie de la morale[1] j’ai présenté pour la première fois psychologiquement, l’idée de contraste entre une morale noble et une morale de ressentiment, l’une née d’un non à l’égard de l’autre et c’est la morale judéo-chrétienne tout entière. Pour pouvoir dire non en réponse à tout ce qui représente le mouvement ascendant de la vie, à tout ce qui est bien né, la puissance, la beauté, l’affirmation de soi sur la terre, il fallut que l’instinct de ressentiment devenu génie, s’inventât un autre monde, d’où cette affirmation de la vie nous apparut comme le mal, la chose réprouvable en soi. Psychologiquement parlant, le peuple juif est un peuple de la plus tenace force vitale. Transporté dans des conditions impossibles, il prend parti, librement, par une profonde intelligence de conservation, pour tous les instincts de décadence, non pas puisqu’il était dominé par eux, mais puisqu’il devinait en eux une puissance qui pouvait le faire aboutir contre le « monde ». Les juifs sont l’opposé de tous les décadents : ils ont dû les représenter jusqu’à l’illusion, ils ont su se mettre à la tête de tous les mouvements de décadence, avec un nec plus ultra du génie de comédien (christianisme de saint Paul), pour en créer quelque chose qui fut plus fort que tout le parti affirmant la vie. Pour la catégorie d’hommes qui, dans le judaïsme et dans le christianisme, aspirent à la puissance pour la catégorie sacerdotale, la décadence n’est qu’un moyen : ces hommes ont un intérêt vital à rendre l’humanité malade et à renverser dans un sens dangereux et calomniateur, la notion de « bien » et de « mal », de « vrai » et de « faux ».


XXV


L’histoire d’Israël est inappréciable comme histoire typique de toute dénaturation des valeurs naturelles ; j’indique cinq faits qui montrent cette dénaturation. Primitivement, surtout du temps des rois, Israël se trouvait, à l’égard de toutes choses, dans un rapport juste, c’est-à-dire naturel. Son Javeh était l’expression du sentiment de puissance, de la joie en soi, de l’espoir en soi : c’est en lui que l’on espérait la victoire et le salut, avec lui que l’on attendait avec confiance que la nature donne ce que le peuple désire, avant tout de la pluie. Javeh est le dieu d’Israël, donc le dieu de la

  1. Dans le tome VII des œuvres complètes en allemand. La traduction française en est sous presse.