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III. — SONGE DE MARDOCHÉE, SA FAVEUR À LA COUR, HAINE D’AMAN.
[XI, 2 — XII 6.]

Prologue ([1]).
1. Chap. xi, 2-12 : Songe de Mardochée.Mardochée (xi, 2-4) ; songe prophétique (xi, 5-12).

2La seconde année du règne d’Assuérus[2], le grand roi, le premier jour du mois de Nisan, Mardochée, fils de Jaïr, fils de Séméi, fils de Cis, de la tribu de Benjamin, eut un songe. 3C’était un Juif qui demeurait dans la ville de Suse, homme illustre et attaché à la cour du roi. 4Il était du nombre des captifs que Nabuchodonosor, roi de Babylone, avait transporté de Jérusalem avec Jéchonias, roi de Juda.

5Voici quel fut son songe : Soudain on entendit des voix, un grand bruit et des tonnerres ; la terre trembla et fut bouleversée. 6Puis soudain deux grands dragons s’avancèrent, tous deux prêts à combattre. 7Ils firent entendre un grand cri et, à leur voix, toutes les nations se préparèrent à la lutte, pour combattre le peuple des justes. 8Puis soudain, ce fut un jour de ténèbres et d’obscurité ; il y eut angoisse, détresse, tribulation et grande épouvante sur la terre. 9Le peuple entier des justes, craignant pour lui tous les maux, était dans le trouble et se préparait à périr. 10Ils crièrent vers Dieu et, à leurs cris[3], il y eut comme une petite source d’où sortit un grand fleuve, une masse d’eau. 11La lumière et le soleil brillèrent ; ceux qui étaient dans l’humiliation furent élevés, et ils dévorèrent ceux qui étaient dans les honneurs.

12S’étant réveillé après avoir vu ce songe et ce que Dieu avait résolu de faire, Mardochée le retint gravé dans son esprit et, jusqu’à la nuit, il fit tous ses efforts pour le comprendre.


2. Chap. xii, 1-6 : Faveur de Mardochée, haine d’Aman.

Puis Mardochée demeura à la cour avec Bagathan et Tharès, les deux eunuques du roi, gardiens de la porte du palais. 2Ayant connu leurs pensées et pénétré leurs desseins, il découvrit qu’ils s’étaient proposés de porter la main sur le roi Assuérus, et il en donna avis au roi. 3Celui-ci fit mettre à la question les deux eunuques et, sur leur aveu, les envoya au supplice. 4Le roi fit écrire dans les Chroniques[4] ce qui s’était passé, et Mardochée en consigna aussi par écrit le souvenir. 5Et le roi ordonna qu’il exercerait un office dans le palais, et il lui donna des présents pour sa dénonciation. 6Mais Aman, fils d’Amadatha, l’Agagite[5], était en grand honneur auprès du roi, et il chercha à perdre Mardochée et son peuple à cause des deux eunuques du roi[6].

  1. (*) De même, ce début existait dans l'édition Vulgate (les LXX) ; mais on ne le trouve ni dans l’hébreu, ni dans aucun interprète. (Note de S. Jérôme.) — Les interprètes dont il est ici fait mention sont les auteurs des anciennes traductions grecques de la Bible, différentes des LXX, et reproduites par Origène dans les Hexaples, où S. Jerôme pouvait les consulter. Mais elles sont toutes postérieures à l’ère chrétienne, et, par conséquent, leur silence ne peut contrebalancer le témoignage positif de l’antique version alexandrine, en faveur de l’authenticité des passages contestés.
  2. 2. Assuérus, Vulg. Artaxerxès. Ce nom vient de la version grecque que S. Jérôme traduit ici, et qui, dans tout le livre, rend par Artaxerxès l'hébreu Achaschvérôsch. Nous avons conservé la forme Assuérus qui répond mieux au texte original.
  3. 10. Et, à leurs cris, etc., m. à m., d’après le grec : Et de leur cri, comme d’une petite source provient un grand fleuve, provint beaucoup d’eau.
  4. XII, 4. Dans les chroniques, ou en souvenir.
  5. 6. L’Agagite : la Vulg., avec les LXX, appelle ici Aman le Bugéen, en gr. Bougaios. Plusieurs donnent à ce mot le sens de vantard, imposteur (Homère, Iliad, xiii, 824) ; d’autres, celui d’eunuque (comp. Bagoas, Jud. xii, 11). Mais comme le grec Bugéen (Ugéen dans quelques exemplaires) apparaît toujours comme traduction de l’hébreu Agâgi (iii, 1, etc.), il est assez naturel d’y voir une altération du mot Agagéen.
  6. (**) Ce qui précède est l’avant propos. Ce qui suit était à l’endroit du livre où il est écrit : Et ils pillèrent leurs biens ou leurs richesses. Nous l’avons trouvé dans la seule édition Vulgate. (Note de S. Jérôme.)
    Observons qu’à l’endroit indiqué (iii, 13) les textes grec et latin portent non pas : ils pillèrent, mais : pour qu’ils pillassent.