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LIVRE DE JUDITH[1]
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PREMIÈRE PARTIE.
[I, 1 — VI, 21.]

AVANT LE SIÈGE DE BÉTHULIE.
1. Chap. i, 1 — ii, 6 : Occasion de la guerre.Grandeur et orgueil d’Arphaxad (i, 1-4) ; il est vaincu par Nabuchodonosor (i, 5, 6). Orgueil du roi de Ninive ; son message aux peuples de l’Asie occidentale (i, 7-9). Ils le dédaignent, colère du roi (i, 10-12). Il charge Holoferne d’exécuter ses vengeances et de lui soumettre l’univers (ii, 1-6).

Arphaxad,[2] roi des Mèdes, après avoir soumis à son empire beaucoup de nations, bâtit de pierres de taille équarries une ville très forte, qu’il appela Ecbatane. 2Il l’entoura de murailles hautes de soixante-dix coudées,[3] sur trente coudées de largeur, et il y construisit des tours hautes de cent coudées, 3de forme carrée, chaque côté ayant vingt pieds de largeur, et il fit les portes[4] en proportion de la hauteur des tours. 4Il se glorifiait comme étant invincible par la puissance de son armée et par la multitude de ses chars.

5Or, la douzième année de son règne, Nabuchodonosor,[5] roi des Assyriens, qui régnait à Ninive, la grande ville, fit la guerre à Arphaxad et le vainquit 6dans la grande plaine appelée Ragau, avec l’aide de ceux qui habitent près de l’Euphrate, du Tigre et du Jadason, dans la plaine d’Erioch, le roi des Eliciens.[6]

7Alors fut agrandie la domination de Nabuchodonosor, et son cœur s’éleva, et il envoya des messagers à tous ceux qui habitaient en Cilicie, à Damas et sur le

  1. * Le Livre de Judith ne nous est point parvenu dans son texte original ; nous n’en possédons que le texte grec (dont dépendent l’Itala et la Peschito) et le texte de la Vulgate, traduit par S. Jérôme d’après un manuscrit chaldéen. De l’aveu de tous les critiques, le texte grec n’est point primitif, et l’étude des nombreux sémitismes qu’il renferme appuie le sentiment de ceux qui admettent un original hébreu. Quoique le texte grec et la Vulgate rapportent absolument les mêmes faits, dans le même ordre et avec les mêmes circonstances, on y remarque pourtant d’assez nombreuses différences de détail, surtout dans les premiers chapitres. L’autorité de l’un et de l’autre nous est garantie par l’usage séculaire qu’en a fait l’Église catholique d’Orient et d’Occident ; mais si la Vulgate, au point de vue dogmatique, mérite un respect particulier à cause de l’approbation officielle que lui a donnée le Concile de Trente, le texte grec paraît être, au point de vue critique, une plus fidèle reproduction de l’original. Ln effet, le texte chaldéen dont s’est servi S. Jérôme, n’était lui-même, très probablement, qu’une traduction de l’hébreu ; de plus, le S. Docteur déclare l’avoir rendu d’une manière libre, et parfois sommaire, tandis que le grec présente tous les indices d’une version littérale. D’ailleurs, la comparaison des deux textes permet d’y constater, de part et d’autre, un certain nombre d’altérations, surtout dans les nombres et les noms propres. Notons aussi qu’en dehors de la recension la plus ancienne et la meilleure, les manuscrits grecs renferment deux autres recensions : celle du codex 58, qui présente de grandes affinités avec l’ancienne version latine et le syriaque ; celle des codices 19 et 108 qui semble plus récente. Notre traduction suit la Vulgate, mais est faite d’après les mêmes principes que celle de Tobie.
  2. 1. 1. Arphaxad : ce nom, défiguré par les copistes, désigne probablement Phraorte (forme modique, Phravortis ou Phraazad), fils de Déjocès et le véritable fondateur du royaume des Mèdes (655-633 av. J. C.).
  3. 2. Hautes de soixante-dix coudées ; c’est la leçon du grec, qui donne à ces murs une largeur de cinquante coudées. Pour la leçon ordinaire de la Vulg. larges de soixante-dix coudées, peut être les copistes auront-ils confondu altitudinem et latitudinem.
  4. 3. Les portes d’après la Vulg. sembleraient avoir eu cent coudées de haut ; mais d’après le grec, plus explicite, Arphaxad leur donna soixante-dix coudées de haut et quarante de large, pour laisser sortir les bataillons de ses vaillants et les rangées de ses fantassins (1, 4).
  5. 5. Nabuchodonosor : quelques-uns croient qu’il s’agit d’Assurbanipal. Le traducteur ne trouvant, à cet endroit du texte original, aucun nom donné au roi d’Assyrie, y aurait mis un nom célèbre entre tous.
  6. 6. Les mots en italique reposent sur la donnée de la version grecque.À ce vers, les LXX ajoutent : Beaucoup de peuples se réunirent pour combattre les fils de Chéléoul.