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Chap. XVII, 5.
Chap. XVIII, 6.
APOCALYPSE DE S. JEAN.

à la main une coupe d’or, remplie d’abominations[1] et des souillures de sa prostitution. 5Sur son front était un nom, nom mystérieux :[2] « Babylone la grande, la mère des impudiques et des abominations de la terre. » 6Je vis cette femme ivre du sang des saints et du sang des martyrs de Jésus ; et, en la voyant, je fus saisi d’un grand étonnement. 7Et l’ange me dit : « Pourquoi t’étonner ? Moi je vais te dire le mystère[3] de la femme et de la bête qui la porte, et qui a les sept têtes et les dix cornes. 8La bête que tu as vue[4] était et n’est plus ; elle doit remonter de l’abîme, puis s’en aller à la perdition. Et les habitants de la terre, dont le nom n’est pas écrit dès la fondation du monde dans le livre de la vie, seront étonnés en voyant la bête, parce qu’elle était, qu’elle n’est plus, et qu’elle reparaîtra. 9— C’est ici qu’il faut un esprit doué de sagesse. — Les sept têtes sont sept montagnes, sur lesquelles la femme est assise. Ce sont aussi sept rois :[5] 10Les cinq premiers sont tombés, l’un subsiste, l’autre n’est pas encore venu, et quand il sera venu, il doit demeurer peu de temps. 11Et la bête qui était et qui n’est plus, en est elle-même un huitième et elle est des sept, et elle s’en va à la perdition. 12Et les dix cornes[6] que tu as vues sont dix rois qui n’ont pas encore reçu la royauté, mais qui recevront un pouvoir de roi pour une heure avec la bête. 13Ceux-ci ont un seul et même dessein, et ils mettent au service de la bête leur puissance et leur autorité. 14Ils feront la guerre à l’Agneau, mais l’Agneau les vaincra, parce qu’il est Seigneur des seigneurs et Roi des rois, et ceux qui l’accompagnent sont les appelés, les élus et les fidèles. » 15Et il me dit : « Les eaux que tu as vues, au lieu où la prostituée est assise, ce sont des peuples, des foules, des nations et des langues.[7] 16Et les dix cornes que tu as vues sur la bête[8] haïront elles-mêmes la prostituée ; elles la rendront désolée et nue ; elles mangeront ses chairs et la consumeront par le feu. 17Car Dieu leur a mis au cœur d’exécuter son dessein, et de donner leur royauté à la bête, jusqu’à ce que les paroles de Dieu soient accomplies. 18Et la femme que tu as vue, c’est la grande cité qui a la royauté sur les rois de la terre. »


3o Un autre ange annonce la chute de Babylone (xviii, 1-3), puis — 4o une voix céleste en donne les motifs et fait entendre les lamentations des mondains, auxquelles répond la joie du ciel (4-20).

Après cela, je vis descendre du ciel un autre ange, qui avait une grande puissance ; et la terre fut illuminée de sa gloire.[9] 2Il cria d’une voix forte, disant : « Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la grande ! Elle est devenue une habitation de démons, un séjour de tout esprit impur, un repaire de tout oiseau immonde et odieux,[10] 3parce que toutes les nations ont bu du vin de la fureur de son impudicité, que les rois de la terre se sont souillés avec elle, et que les marchands de la terre se sont enrichis par l’excès de son luxe. » 4Et j’entendis du ciel une autre voix qui disait : « Sortez du milieu d’elle, ô mon peuple, afin de ne point participer à ses péchés, et de n’avoir point part à ses calamités ; 5car ses péchés se sont accumulés jusqu’au ciel, et Dieu s’est souvenu de ses iniquités.

6Payez-la com-
  1. 4. Abomination a toujours dans l’Écriture le sens d’idolâtrie, avec les souillures morales qu’entraîne le culte des idoles.
  2. 5. Nom mystérieux (litt. mystère), qu’il ne faut pas prendre à la lettre, mais interpréter symboliquement.
  3. 7. Le mystère : le sens symbolique de la femme (v. 15) et surtout de la bête (v. 8-17), sur la signification de laquelle le chap, xiii n’avait donné aucune explication.
  4. 8. La bête que tu as vue, ici et déjà auparavant (chap. xiii). — L’abîme, dans l’Apocalypse, est le séjour, non des morts, mais des démons Voy. ix, 1 ; xx, 1. — Qu’elle reparaîtra : ces mots manquent dans la Vulgate.
  5. 9. Sept rois : c’est-à-dire sept empires, d’après l’analogie de notre prophétie avec celle de Daniel, où les têtes, représentant des empires, sont cependant aussi appelées des rois (Dan. vii, 17).
  6. 12. Les dix cornes (couronnées, xiii, 1) sont dix rois, c.‑à-d. dix royaumes (cf. v. 9). — Pour une heure : pour un temps relativement court ; ou peut-être pour une même heure (μίαν ὥραν) pendant une même période historique. — La leçon de la Vulgate : après la bête, peut se ramener au même sens, si l’on traduit : à la suite de la bête. Notons encore que ces mots, comme on le voit dans S. Hippolyte, pourraient, sans beaucoup modifier le sens, être rattachés au verset suivant : Avec la bête, ils ont un même dessein.
  7. 15. Les versets suivants, sous forme d’appendice, pourraient contenir une prophétie spéciale de la ruine de Rome par les nations barbares. — Peuples, foules, etc. Comp. viii, 8.
  8. 16. Sur la bête : d’après une autre leçon, et la bête.
  9. XVIII. On retrouve dans ce chapitre plus d’un écho des antiques prophéties contre Babylone et Tyr. Voy. Is. xiii, xiv et xxiii ; Ez. xxvii et xxviii ; Jér. l et li. Mais il faut faire très grande la part du symbolisme ; et ce serait méconnaître l’intention de l’auteur inspiré que de prendre à la lettre les détails du tableau poétique qu’il va tracer pour dépeindre, sous de vives couleurs, la ruine définitive de la cité antichrétienne.
  10. 2. Is. xiii, 21 ; xxxiv, 11-14 ; Jér. l, 39 ; comp. Matth. xii, 43.