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conséquence logique de l’exactitude, de la clarté, de la correction, réclament un écrivain d’un talent supérieur. Il faudrait, enfin et par-dessus tout, un homme qui, à la fois savant philologue, poète et littérateur éminent, possédât le sens religieux suffisant pour donner à son œuvre une véritable empreinte biblique, et placer les lecteurs comme en la présence directe des révélations divines, dont il ose se rendre l’interprète.

Voilà les principes. Reste l’exécution. Voilà l’idéal, idéal dont la vue sourit et électrise, mais impossible à réaliser. Est-il besoin, en effet, de proclamer à nouveau qu’une version à tous égards parfaite est chose qui dépasse les forces humaines, individuelles ou collectives ? Qu’on veuille bien y réfléchir. Les ressources d’interprétation dont peut disposer un traducteur, si remarquablement qualifié soit-il, connaissances linguistiques, ethnographiques, archéologiques, étude et comparaison des travaux antérieurs, etc., ces ressources sont purement humaines, sujettes par conséquent à des chances d’erreur, malgré les progrès, disons mieux, en vertu même des progrès dont elles sont susceptibles. Sans doute, celui qui croit, celui pour qui la Bible n’est pas un livre ordinaire, n’entreprendra pas et ne poursuivra pas une œuvre d’aussi longue haleine et d’une nature aussi grave que la version des saintes Écritures, dépôt des révélations du Tout-Puissant, en négligeant de s’appuyer sur le secours de Dieu et de l’invoquer itérativement au milieu de ses incertitudes et de ses défaillances. Mais qui dira dans quelles limites et sous quelles formes le secours divin se manifeste en pareille circonstance ? Peut-on s’attendre à une force surnaturelle qui préserve de toute inexactitude, à une sorte d’inspiration infaillible qui n’a pas même été le privilège des copistes auxquels nous sommes redevables du texte original dont il s’agit de reproduire le sens dans nos langues modernes ? Aux prises avec les difficultés (et pourquoi ne pas l’avouer ?), on se sent vaincu dans plus d’un cas, incapable de rendre d’une manière satisfaisante dans sa propre langue ce dont on a, ou croit avoir, la perception nette dans la langue sacrée. Et là même où on pense le mieux réussir en serrant de très-près le texte scripturaire, pour en conserver avec scrupule les tours, les images, la couleur, ne va-t-on jamais trop loin, ne fait-on jamais fausse route ? Puis, que de choses inaperçues, glissées peut-être sous la plume contre toute intention et malgré les principes !

En dehors de ces imperfections, dont aura son inévitable part la traduction nouvelle que nous offrons au public religieux, ce qui frappera plus rapidement le lecteur, ce sont les passages interprétés autrement qu’ils ne le sont dans les versions usuelles.