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avait enfin Thorir Thurs et son frère Thorgeir Jardlang, Odd le Solitaire et l’affranchi Gris. Ils étaient douze pour se mettre en route, tous d’une force peu commune et parmi eux il s’en trouvait beaucoup qui avaient le don de se métamorphoser. Ils disposaient d’une embarcation à rames qui appartenait à Skallagrim. Ils se dirigèrent vers le Sud le long des terres, pénétrèrent dans le Ostrarfjord et suivirent la voie de terre jusqu’à Vors, sur les bords du lac qui a là son origine et qu’ils furent, au cours de leur pérégrination, obligés de franchir. À cet effet, ils firent usage d’un bateau à rames qui leur convenait à souhait. Ils ramèrent donc à travers le lac, et de là il n’y avait plus qu’un court trajet pour arriver à la ferme où le roi assistait à un festin. Grim et ses amis se présentèrent au moment où le roi venait de se mettre à table. Ils accostèrent quelqu’un à l’extérieur de l’habitation et lui demandèrent ce qui s’y passait. Quand ils furent renseignés, Grim fit appeler Ölvir Hnufa pour lui causer. L’homme entra dans la salle, s’approcha de la place où Ölvir était assis et lui dit : « Il vient d’arriver ici devant la ferme douze hommes, si on peut les appeler des hommes ; car par la taille et par l’aspect ils ressemblent à des géants plutôt qu’à de véritables êtres humains. »

Aussitôt Ölvir se leva et sortit. Il pensait savoir quels étaient les nouveaux venus. Il accueillit bien Grim, son parent, et le pria d’entrer avec lui dans la salle. Grim dit à ses compagnons de route : « La coutume en ce pays veut que l’on se présente sans armes devant le roi. Six d’entre nous entreront ; les six autres resteront au dehors et garderont nos armes. »

Là-dessus ils entrèrent. Ölvir s’avança vers le roi ; derrière lui se tenait Skallagrim. Ölvir prit la parole : « Grim, fils de Kveldulf, vient d’arriver ici. Nous sommes persuadés qu’il vous saurait gré si vous vouliez lui réserver un accueil aussi favorable que nous sommes en droit de l’espérer. Vous avez fait grand honneur à maintes personnes qui le méritaient moins que lui. Il ne se trouve guère des hommes possédant au même degré que lui la plupart des qualités du corps et de l’esprit. Faites comme je vous en prie, ô roi, car j’y attache une grande importance ; à moins que mon avis ne vous laisse indifférent. »

Ölvir parla longtemps et avec éloquence ; c’était un homme