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semblables. Une chose est certaine, c’est qu’ils doivent être mes ennemis déclarés, et il est fort probable qu’ils le payeraient cher, si nous étions seuls à débattre cette affaire ». Là-dessus Thorolf partit. Le lendemain il remit le tribut. Le roi était présent. Quand tout fut arrangé, Thorolf apporta quelques peaux de castor et de zibeline en disant qu’il voulait en faire cadeau au roi. Un grand nombre des assistants déclarèrent que c’était là un beau geste et digne de sentiments d’amitié. Le roi dit que Thorolf s’était, au préalable, attribué lui-même sa récompense. Celui-ci affirma qu’il avait procédé en toute loyauté et, dans la mesure du possible, selon les intentions du roi. « Si toutefois ce n’est pas à sa convenance, je ne peux rien y faire. Le roi n’ignore point quelle a été mon attitude, lorsque je vivais à sa cour et que je faisais partie de sa suite ; et il me semble étonnant que, m’ayant éprouvé jadis, il m’apprécie tout autrement aujourd’hui. »

Le roi répondit : « Excellentes étaient tes dispositions, Thorolf, lorsque tu vivais auprès de nous. J’estime que le mieux à faire, c’est de te joindre de nouveau à ma suite ; tu porteras mon étendard et tu commanderas à mon entourage. Personne ne te calomniera, si je puis constater nuit et jour comment tu te comportes. »

Thorolf jeta un regard des deux côtés où se tenaient ses serviteurs, et dit : « C’est à regret que je me séparerai de cette troupe. Tu peux disposer, ô roi, des titres[1] et apanages que tu m’as conférés ; mais je ne congédierai pas mes hommes aussi longtemps que j’aurai des moyens de subsistance, quand même je devrais vivre de mes propres ressources. Si je puis exprimer un vœu, je désire, ô roi, que vous veniez me voir chez moi, pour entendre les paroles de personnes en qui vous avez confiance et recevoir le témoignage qu’elles rendront de moi dans cette affaire. Prenez alors telles mesures qui vous paraîtront conformes à la justice. » Le roi répondit et dit qu’il n’entendait pas être reçu une deuxième fois chez Thorolf. Sur ces mots, Thorolf s’en alla et se disposa à rentrer dans ses domaines. Lorsqu’il fut parti, le roi Harald

  1. Titres honorifiques, tels que hersir, jarl, etc., avec les privilèges qui y étaient attachés.