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tôt sur vos gardes, car je soupçonne qu’il y a des individus qui vous guetteront dans la forêt. Je n’ai personne qui puisse se joindre à toi pour renforcer ta troupe. Mais je vais te faire une proposition : tu resteras ici avec moi jusqu’au moment où je pourrai t’assurer que le passage de la forêt est libre. »

Egil répondit : « Tout cela n’est que de l’imagination ; j’irai mon chemin comme je me le suis proposé. »

Egil se disposa donc à partir avec ses hommes. Mais Alf le lui déconseilla ; il lui recommanda de rebrousser chemin, dès qu’il remarquerait des traces de pas sur la route, ajoutant que personne n’était passé par la forêt dans la direction de l’est depuis l’arrivée d’Egil, « si ce n’est ceux que je soupçonne vouloir vous surprendre ».

« Combien penses-tu qu’ils soient, s’il en est comme tu dis ? Nous ne sommes pas faciles à aborder, bien que notre troupe ne soit guère imposante. »

« J’étais allé du côté de la forêt avec mes domestiques, » répondit Alf ; « nous avons observé des traces de pas d’hommes, et ces pas se dirigeaient vers la forêt. Ils doivent avoir formé un groupe nombreux. Si toutefois tu n’as pas confiance en mes paroles, vas-y alors et examine les traces ; mais reviens sur tes pas si tu constates qu’il en est comme je te dis. »

Egil se mit en route. Arrivé dans le chemin qui menait vers la forêt, on observa à la fois des traces d’hommes et de chevaux, et les compagnons d’Egil furent d’avis de retourner sur leurs pas.

« Nous irons en avant, » dit Egil, « je ne pense pas qu’il faille s’étonner que des gens soient passés par la forêt d’Eid. N’est-ce pas une voie de grande communication ? »

Ils continuèrent donc leur marche. Les traces de pas se continuaient et apparaissaient nombreuses. Ils arrivèrent à un endroit où les chemins bifurquaient. Là aussi, les traces se partageaient et se retrouvaient en nombre égal de part et d’autre.

Alors Egil dit : « Maintenant, il ne me semble pas impossible qu’Alf ait dit la vérité. Apprêtons-nous donc, comme si nous avions à nous attendre à faire la rencontre de ces gens ! »

Sur ces mots, ils jetèrent bas leurs manteaux et tous leurs vêtements de dessus et les déposèrent dans des traîneaux. Egil avait emporté dans son traîneau une corde de filasse très grosse.