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séjournait dans les régions septentrionales. Après une année passée en Norvège, Björn et Thorolf, au retour du printemps, aménagèrent leur bateau et rassemblèrent un équipage. L’été venu, ils partirent en expédition vers les pays de l’Est et, en automne, ils rentrèrent chargés d’un butin considérable. À leur retour, ils apprirent que le roi Harald était à ce moment au Rogaland et qu’il y passerait l’hiver. Harald, à cette époque, commençait à vieillir, et ses fils étaient pour la plupart assez avancés en âge ; mais son fils Eirik, surnommé Blodöx[1], était encore jeune. Celui-ci recevait l’éducation chez le hersir Thorir, fils de Hroald. De tous ses enfants, c’était lui que Harald aimait le plus. Thorir vivait alors en excellents termes avec le roi.

Dès leur retour au pays, Björn et Thorolf allèrent d’abord à Aurland ; puis ils dirigèrent leurs pas vers le nord, sur Firdir, pour rendre visite au hersir Thorir. Ils avaient un vaisseau avec douze ou treize rameurs à bord[2] et ils emmenèrent trente hommes environ. C’était un bateau qu’ils avaient saisi au cours de leurs expéditions de l’été ; il était richement peint au-dessus de la ligne de flottaison et excessivement beau. À leur arrivée chez Thorir, ils furent reçus avec bienveillance ; ils y séjournèrent quelque temps, pendant que le bateau pourvu de tentes flottait à l’ancre non loin de la ferme. Or, un beau jour, Thorolf et Björn descendirent vers le bateau et virent qu’Eirik, le fils du roi, était là, allant tantôt du rivage au bateau, tantôt du bateau au rivage, s’arrêtant et examinant l’embarcation.

Alors Björn dit à Thorolf : « Le fils du roi admire beaucoup le bateau. Propose-lui de l’accepter de ta part, parce que je sais que cela nous vaudra la grande faveur du roi, si Eirik devient

    l’île de Stordö (Söndhordland). Alreksstad, auj. Aarstad, près de Bergen. Lygra, auj. Lygre, dans une petite île au nord de Bergen. Säheim, auj. Säim, dans le Nordhordland.

  1. « À la hache ensanglantée. » Eirik avait fait périr plusieurs de ses frères.
  2. C’était un karfi. Les karfar étaient des bateaux spéciaux, de grandeur variable, toujours peints au-dessus de la ligne de flottaison. Les sagas leur attribuent, suivant le cas, six à seize sièges de rameurs. (Cf. lat. corbita, corbeta ; fr. corvette.)