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la saga de nial

chercher Hjedin. Hjedin alla tout de suite trouver Hrut et fut très-bien reçu chez lui. Hrut le plaça en face de lui, et ils parlèrent ensemble de la façon que Njal avait prédite. Quand ils en vinrent à la plaine de la Ranga, et que Hrut s’informa des hommes de là-bas, Hjedin chanta ces vers :

« C’est là, en vérité, qu’il y a le moins d’hommes (ainsi disent les gens tout bas, et je l’ai entendu souvent) dans la plaine de la Ranga. Le seul Mörd Gigja s’est fait connaître pour ses hauts faits. Jamais, parmi ceux qui jettent l’or à pleines mains, il n’eut son pareil en sagesse ni en puissance ».

Hrut dit : « Tu es un skald, Hjedin. Mais as-tu entendu dire ce qui s’est passé entre Mörd et moi ? » Et Hjedin chanta :

« Je sais que par ses artifices le chef aux anneaux d’or t’a enlevé un précieux rejeton de la terre. Et ceux qui portent le bouclier lui ont conseillé, (souvent son épée s’était rougie de sang) de ne pas combattre contre toi ».

Alors Hrut lui dit comment il fallait reprendre l’affaire, et il prononça la citation. Hjedin la dit après lui, et dit tout de travers. Hrut se mit à rire, et il ne se doutait de rien. Hjedin dit à Hrut de recommencer une seconde fois. Hrut le fit. Hjedin répéta après lui, et cette fois il dit bien et il prit à témoins ses compagnons qu’il citait Hrut en justice, au nom d’Unn, fille de Mörd, qui lui avait mit sa cause en main.

Le soir, il alla se mettre au lit comme les autres. Mais quand Hrut fut endormi, ils prirent ce qui était à eux et montèrent sur leurs chevaux, puis ils s’en allèrent, passant la rivière, du côté de Hjardarholt, jusqu’au bout de la vallée, et ils restèrent là, dans la montagne, parmi les gorges du Haukadal, en un endroit où on ne pouvait les trouver que si on arrivait droit sur eux. Leurs selles et leurs armes étaient restées dans la forge, et il leur fallut aller les chercher. Mais pas un homme ne s’aperçut de leur départ.