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la saga de nial

dit Thorir, l’affaire doit être bien chanceuse, s’il faut toute une foule contre trois hommes. » Alors Egil partit, en colère. Sa femme dit au Norvégien : « Maudite soit l’heure où ma fille Gudrun a oublié sa fierté et dormi à ton côté, si tu n’oses pas suivre ton beau-père. Il faut que tu sois un lâche » dit-elle. — « J’irai avec ton mari, répondit-il, et nul de nous ne reviendra. » Après cela il alla trouver Thorgrim son compagnon, et lui dit : « Prends les clefs de mes coffres, car je ne les ouvrirai plus. Je veux aussi que tu aies, des richesses qui sont à nous deux, autant que tu en voudras. Et puis va t’en, et ne t’occupe pas de me venger. Si tu ne t’en vas pas, tu es un homme mort. » Alors le Norvégien prend ses armes, et il part avec le reste de la troupe.

LXII

Il faut revenir à Gunnar, qui chevauche vers l’est, passant la Thjorsa. Comme il s’éloignait de la rivière il sentit une grande envie de dormir, et il pria les autres de s’arrêter là. Il tomba dans un profond sommeil, et s’agitait en dormant. Kolskegg dit : « Voici que Gunnar rêve. » Hjört dit : « Je vais l’éveiller. » — « Ne fais pas cela, dit Kolskegg ; il faut que son rêve s’achève. » Gunnar dormit longtemps. Quand il s’éveilla, il jeta loin de lui son bouclier, et il avait très-chaud. Kolskegg dit : « Qu’as-tu rêvé mon frère ? » — « J’ai rêvé de telles choses, dit Gunnar, que nous ne serions pas partis de Tunga en si petit nombre, si j’avais fait ce rêve là-bas. » — « Dis-nous ton rêve » dit Kolskegg, Gunnar chanta :

« J’ai vu, m’a-t-il semblé, une troupe nombreuse qui fondait sur nous trois. Je vais rompre, j’en suis sûr, le jeûne des corbeaux affamés, qui nous suivent depuis Tunga. Ô guerrier qui lance des flammes, les vautours vont venir, je te l’annonce, arracher aux loups les cadavres. Terrible était mon rêve. »

« J’ai, rêvé, dit Gunnar, que je chevauchais, passant