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laug offrit un marc. Le bondi trouva que c’était trop peu. Alors Gunnlaug dit ces vers :

« J’ai offert un marc pour un homme d’une force médiocre — dispensateur de l’éclat des vagues, tu devrais te disposer à accepter ces gris anneaux des doigts — tu t’en repentiras, si tu laisses échapper de ta bourse la couche commune de la race du dragon, que t’accorde le distributeur de la semence de Frodi[1]. »

L’accord fut conclu ainsi que le proposait Gunnlaug, et, aussitôt l’arrangement fait, ils se quittèrent.

Peu de temps après, Gunnlaug demanda pour la seconde fois à son père les moyens d’entreprendre un voyage à l’étranger. Illugi répondit : « Cette fois il sera fait selon ton désir, car tu as beaucoup changé depuis quelque temps. » Ensuite Illugi s’en alla de chez lui et acheta par moitié pour Gunnlaug un bateau qui stationnait à l’embouchure de la Gufa, chez un homme appelé Audun et surnommé « le Dogue ». (Cet Audun est le même que celui qui refusa d’emmener hors du pays les fils d’Osvif l’Ancien, après le meurtre de Kjartan Olafsson ainsi que le raconte la Laxdoela saga ; Gunnlaug

  1. L’éclat des vagues = l’or ; le dispensateur de l’éclat des vagues = l’homme. — Les gris anneaux du doigt sont les bagues en argent gris. Dans les anciens temps, l’Islande ne connaissait pas la monnaie proprement dite. Pour les échanges on se servait de lingots d’or ou d’argent, surtout de bagues qui avaient en général un poids bien déterminé. — La couche commune de la race du dragon = l’or ; on connait les légendes de dragons couchés sur les trésors dont ils sont les gardiens (cf. Fafnir). — Frodi, roi légendaire de Danemark, est représenté comme le roi de l’âge d’or ; la semence de Frodi = l’or ; le distributeur de la semence de Frodi = l’homme généreux ; ici, Gunnlaug. — Le sens de la strophe est celui-ci : « Si tu n’acceptes pas la compensation que je t’offre, tu n’obtiendras rien. »