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Liverpool en Angleterre, Baltimore dans l’Amérique du Nord, La Havane aux Antilles, Bahia et Rio-de-Janeiro au Brésil, La Plata plus au Sud, étaient les grands ports d’armement des négriers. Des côtes européennes aux rives africaines, de là aux colonies d’Amérique avec retour en Europe, il y avait un circuit fermé, un continuel échange des marchandises d’Europe contre du « bois d’ébène », puis du « bois d’ébène » contre les denrées coloniales : ce qui assurait des cargaisons énormes à de véritables flottes négrières.

À bord, les forçats de l’esclavage sont des centaines. Pour les contenir, l’équipage est réduit à une poignée d’hommes, cantonnés dans le gaillard d’arrière, où sont les commandes du navire, la barre de gouvernail et la soute aux munitions. Au-dessus de leur grande chambre, est la cabine du capitaine. De plus, au milieu du tillac, barrant le navire en deux, isolant les femmes des hommes, est une rambade de huit pieds de haut, renforcée de gros clous, où deux marins sont constamment de quart. Des embrasures sont percées dans ce fortin, par lesquelles passent les volées de deux pièces. En cas, d’émeute, un tir à mitraille balaiera le pont et forcera les mutins à se réfugier sous les caillebottis de l’entrepont. Et ces précautions ne suffisent pas toujours.

Lisez, d’Henri Malo, les Isles de l’aventure. Soixante-dix-huit esclaves, enferrés deux à deux dans le senault dunkerquois Samuel-Marie, envahissent le pont au moment de quitter la grande île Banane. Des poulies, des morceaux de bois leur servent de projectiles : « Le carnage fut si terrible que, ne pouvant se rendre maîtres des