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aux passants qui s’aventurent dans les forêts, dans les savanes où l’herbe est haute ou, la nuit, dans les sentiers qui relient les villages. Les libates, les slatis, en un mot les marchands de chair humaine sont en embuscade.

Des courtiers mulâtres de Gorée ayant demandé des esclaves au roi de Joal, des détachements d’une douzaine d’hommes, un mousquet pendant à la selle et un arc sur le dos, furent envoyés, de nuit, dans différents villages qui relevaient de lui. Le Suédois Wadstrom assista au retour de la razzia. Le spectacle était navrant : « Des hommes succomboient à la plus grande tristesse. Les femmes exhaloient leur désespoir en pleurs et en gémissemens. Les enfans, saisis d’effroi, pressoient le sein de leur mère, dont ils ne vouloient pas se détacher ; leurs petits yeux étoient tellement gonflés de larmes, qu’ils ne pouvoient plus pleurer. Les soldats, pour montrer leur joie dans cette occasion, ne cessoient de battre sur de gros tambours. Réunissant les cris de désespoir des uns et les éclats de joie des autres aux instrumens les plus bruyans, l’on se formera à peine une idée de la scène la plus infernale dont j’aie jamais été témoin. »

Dans le Benguéla, rapporte le P. Cavazzi, les Bembis rassemblent leurs troupeaux et les poussent du côté où ils savent que vient l’ennemi. Les animaux épouvantés se dispersent de tous côtés, tandis que leurs maîtres se couchent, l’arme au poing, dans les grandes herbes ou les halliers. Quand l’ennemi, rompant ses rangs, se met à la poursuite du bétail, les Bembis surgissent de leurs embuscades et bientôt de nombreux prisonniers