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villes d’Égypte il était interdit de tuer : le crocodile. À cette divinité, la marée qui refoulait l’eau de la rivière, apportait souvent comme pâture les corps d’esclaves que les négriers jetaient par-dessus bord : les femmes flottaient, disait-on, sur le ventre et les hommes sur le dos. Quand le capitaine de vaisseau, Bouët-Villaumez, au milieu du dix-neuvième siècle, vint y pourchasser les négriers, il constata que les indigènes parlaient presque tous l’anglais, quelques-uns le français ou l’espagnol, décelant ainsi quelle était pour chaque nation l’importance de la traite négrière. Traite qui était, selon Labarthe « un échange de blancs contre des noirs », la majeure partie des équipages trouvant dans ces lieux malsains leur tombeau. Des crânes pavaient le vestibule et la salle du festin où un chef calabar invitait, en 1844, le capitaine hollandais Van Boudyck Bastiaanse.

Nos relations avec le Gabon remontaient à Louis XIV. Un manteau d’écarlate avait fait abandonner au vieux roi grabataire du cap Lopez, la médaille de plomb doré à l’effigie du prince d’Orange qui lui pendait sur l’estomac. Le négociateur, un corsaire du nom de Jean Doublet, avait aussitôt mis le traité à profit pour embarquer cinq cent soixante nègres à bord de l’Avenant, quand le 8 décembre 1704, une barrique d’eau-de-vie prit feu, au moment où l’aumônier vêtait sa chasuble pour célébrer la fête de la Sainte-Vierge. Le vaisseau sauta. « C’était une chose épouvantable de voir des noirs et négresses nager sur l’eau, les fers aux pieds, et les requins en grand nombre les dévoroient. » Car les Goulus,