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ni canons », disait au dix-huitième siècle Saugnier.

« Menteurs au possible et grands trompeurs, disait dès 1455 Ca’ da Mosto, autrement fort charitables, ce sont gens hardis et brutaux qui, à tout hasard, se laissent plutôt ôter la vie que de marcher un seul pas en arrière, ni montrer le moindre signe de couardise. » Couverts d’une épaisse cuirasse de coton tordu, une rondache de cuir au bras, les Yolofs ne craignent point les poufs de nos fusils, quand ils ont à leur cou, à leurs bras ou à leurs jambes, des « billets en langue arabe, mêlés de quelques figures négromanciennes », les gris-gris de leurs marabouts. Pour la plupart musulmans, les nègres sénégalais apprennent, en effet, de leurs marabouts à lire et à écrire en arabe sur de petites planchettes de bois, mais non pas tous.

Les Yolofs ont une des plus jolies langues de la Négritie et si variée qu’ils ont trois mots pour distinguer le bonjour du matin, celui de l’après-midi et celui du soir. « Elle perdrait à être traduite en français », déclarait en 1765 le voyageur Pruneau de Pommegorge. Ils étaient aussi parmi les plus rétifs à l’esclavage. Plusieurs centaines d’entre eux, enchaînés par paires à la chaîne du collard dont l’extrémité était un collier fixé autour du cou, tentèrent de s’emparer de notre fort de Gorée en surprenant le corps de garde. Dénoncés par un enfant, leurs chefs avouèrent hautement leur dessein et, pour l’exemple, furent placés à la bouche de deux canons qui les projetèrent en loques à quinze pas de là. Leurs camarades, embarqués sur un négrier, tentèrent, nous