l’esclave était supprimé, il laissait un résidu, une haine de races, un ostracisme qui ne s’atténue point, au contraire. Le Nord, plus dispos jadis à envisager le problème du point de vue chrétien, épouse davantage la façon de voir du Sud, maintenant que les gens de couleur l’envahissent, qu’ils ont à New York le quartier de Harlem et que Chicago a une ceinture noire.
Et le danger est d’autant plus grand que les nègres, très prolifiques, sont au nombre de onze millions, près du dixième de la population totale des États-Unis. Et ce groupe imposant a une élite, avocats, docteurs, artistes, banquiers ; il a son université, ses journaux et ses théâtres. Un de ses plus brillants écrivains, Burghardt Du Bois, a lancé dans « Les âmes du peuple noir », The souls of black folk, l’appel d’une race qui souffre de l’isolement où elle est claustrée. La barrière de la quarantaine cèdera-t-elle, et dans quelles conditions ? André Siegfried se le demande anxieusement : « Ce problème est un gouffre, sur lequel on ne peut se pencher sans effroi. »