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fit savoir, en envoyant à Port-au-Prince cent trente-sept grains de maïs, qu’il était prêt à se retirer avec autant de nègres dans la paroisse de Neybe, qu’on leur donnait comme asile avec la liberté. Et il accepta de devenir, avec sa troupe, un chasseur de marrons.

Toutes les îles à esclaves avaient leurs marrons : « Le marronage, écrivait un colon, est l’échelle à laquelle on peut mesurer l’administration douce, intelligente, sévère ou cruelle d’une propriété. » À la Martinique, le gouverneur Clodoré, par traité, avait désarmé l’un de ces chefs de bande, qui avait pris le nom de son maître Francisque Fabulé. Il faillit être poignardé par lui. Et comme un autre marron, soumis au supplice de la roue, exhortait ses congénères à se rendre les maîtres de la Martinique, le gouverneur Machault demanda au roi d’appliquer aux marrons le châtiment dont on usait dans les colonies anglaises : on en faisait des eunuques quand il y avait récidive : « Il n’y a rien dans les lois de l’Église qui y soit contraire », ajoutait-il. Mais Louis XIV, en 1705, ne voulut rien entendre : le code noir avait de suffisantes pénalités… Il n’y parut point, quand, en 1737, les contumaces de la bande Bordebois furent rompus vifs. Loin d’être intimidés, les autres fugitifs, de féroces Mondongues, s’emparèrent de l’enfant d’un planteur qu’ils dévorèrent.

Les Anglais, à la Jamaïque, avaient voulu exterminer les marrons : « La politique, qui a des yeux, n’a point d’entrailles. » Mais les troupes détachées contre les fugitifs par des marais affreux, à ce jeu cruel, vite s’épuisèrent.