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vendre à un négrier anglais un lot d’esclaves, Job commit l’imprudence de s’endormir sous un baobab, auquel il avait suspendu son poignard d’or massif et son sabre incrusté de perles. Des Mandingues passèrent qui le dépouillèrent de tout, lui rasèrent la tête et le menton, ainsi qu’on le faisait aux esclaves, et le vendirent en mars 1730 au capitaine Pyke, le même à qui il devait remettre les captifs de son père. En vain protesta-t-il. Ne sachant que l’arabe et la langue peule, il fut incompris. Il allait devenir l’esclave d’un planteur du Maryland, nommé Tolsey.

Un jour, il s’échappa et, à travers bois, gagna la Pennsylvanie, où il fut arrêté et incarcéré.

— « Allah, Mahomet, Allah  ! » s’écria-t-il à la vue d’un Anglais nommé Bluet, qui visitait la prison. Et il repoussa un verre de vin qu’on lui offrait. Un vieux nègre yolof, heureusement, put servir d’interprète. Et, pour la première fois, le pauvre Job put faire connaître sa position sociale et sa mésaventure. Une lettre qu’il écrivit en arabe à son père pour lui demander l’envoi d’une rançon, fut traduite. Elle témoignait de tant de noblesse et de grandeur, elle dépeignait de façon si poignante les traitements infligés aux esclaves, que des Anglais s’intéressèrent à lui. Il fut embarqué à destination de l’Angleterre, en 1733 ; présenté à la famille royale, il servit d’interprète au célèbre orientaliste Sloane pour la traduction de manuscrits arabes et reçut des ducs et lords, qui l’avaient convié à dîner, des cadeaux, de l’argent, des instruments de physique, etc. En août 1734, il était rapatrié dans la rivière de Gambie.

Des Mandingues passaient. Il allait tirer sur ses