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celui de dormir sans cesser de jouer. Ils ont sur les racleurs européens l’avantage de n’être pas les instruments passifs du plaisir des autres : ils entrent si bien dans le sens de la chose que la partie de leur corps qui est assise, frétille, dans un accord parfait avec le pied qui bat la mesure et le bras qui conduit l’archet. Jamais, ajoute le baron de Wimpffen, la volupté en action ne tendit de piège plus séducteur à l’avide amour du plaisir ».

À l’appel d’une musique enivrante répond une danse qui mime tour à tour l’amour naissant, victorieux, satisfait. « Les négresses déployent une telle volubilité de reins qu’à peine l’œil peut-il saisir quelques nuances du fugitif et rapide développement de leurs grâces lascives, provoquant à la lutte la plus séduisante » leurs vis-à-vis. Jeu du mouchoir ou du jupon, élan en avant, recul brusque, telle était, dans la nuit tropicale des Antilles parfumées, sous les flamboyants, la voluptueuse chica, plus connue aujourd’hui sous le nom de biguine, la même sans doute que la sega des îles de France et de Bourbon.

Avant d’être nommée la « casse-cœur », — casséco, — la chica s’appelait à Cayenne la congo. À Saint-Domingue, il y a des sociétés congos pour qui « la danse est aussi vieille que l’Afrique ». « Leur musique semble imitée du gazouillement des oiseaux, écrivait, en 1782, un Suisse. On ne peut s’empêcher d’y admirer la précision du mouvement, la difficulté de l’exécution et de l’harmonie, lorsque plusieurs chantent ensemble. Ils ont des coups de gosier remarquables