chaque soir les nègres dans leurs dialectes respectifs qu’il s’était assimilés. Et ses instructions, qui témoignaient d’une connaissance profonde de leurs coutumes, étaient appropriées à leur état d’âme. Quand ses austérités le conduisirent au tombeau le 21 décembre 1742, ce fut un deuil universel. Un demi-siècle plus tard, « il n’était pas un seul individu » qui ne connût le nom de cet homme de bien.
Les jésuites, n’écoutant que leur zèle apostolique, allaient parfois un peu loin. Quel retentissement devait avoir, en 1733, à la Guadeloupe, le sermon de l’un d’eux : « Les hommes se révoltent contre Dieu ; les noirs se révoltent contre les blancs et en cela vengent Dieu ; le temps n’en est pas loin. »
Aussi quand les révérends Pères s’avisèrent d’instituer à la Martinique la Confrérie de l’esclavage de la Sainte-Vierge, une lettre du ministre, en 1752, les désapprouva formellement. Là, les noirs rivalisaient d’apparat avec les blancs, lors des processions de la Fête-Dieu : on en voyait en habits très riches figurer le roi, la reine et jusqu’aux grands officiers de la Couronne, si bien qu’il leur fut défendu d’assister aux processions autrement qu’en habits ordinaires, à peine du fouet et du carcan. Singulière religion ! Quatre ans auparavant, lors de la messe de minuit, les nègres de la Martinique, la plupart marrons, n’avaient-ils pas formé le projet d’envahir les habitations presque vides, d’enlever les armes et de faire ensuite main basse sur les fidèles ? Aussi le gouverneur de l’île, Fénelon, écrivait-il, en 1764, ces lignes désabusées : « Je suis venu avec